Le Québec joue toujours un rôle important lors
d’une élection fédérale, ne serait-ce qu’en raison du nombre important de
députés dans la province (78 sur 338). Mais cela est encore plus vrai cette
année. Le Québec pourrait en effet être la clé d’une réélection pour Justin Trudeau.
Il y a une certaine ironie à voir une province
qui a voté majoritairement pour la CAQ et la laïcité il y a 1 an de cela -et
qui soutient majoritairement la loi 21- qui pourrait fort bien être la raison
principale pour laquelle Trudeau conserva son poste. Mais la politique est
parfois bizarre. Aussi, le mode de scrutin étant ce qu’il est, un parti à 35%
peut gagner très gros, surtout si l’opposition est divisée.
Il est encore tôt dans cette campagne pour vraiment
aller dans les détails. Les projections actuelles sont disponibles ici. Mais
une chose semble acquise : le NPD est en forte chute par rapport à 2015.
Tellement en fait que le parti de Jagmeet Singh se retrouve parfois derrière
les Verts d’Elizabeth May et à des niveaux d’appuis d’avant 2008. En gros le
NPD au Québec n’existe quasiment plus.
Les Néo-democrates avaient déjà subit de fortes
pertes en 2015, 4 ans après une vague orange qui avait permis à cette formation
de devenir l’opposition officielle. Ils avaient quand même remporté 16 sièges.
La question devant nous est ainsi claire : à qui iront ces sièges? Regardons
cela en détails.
Sur cette liste, Outremont est déjà retournée
en mains Libérales après une partielle en raison de la démission de Thomas
Mulcair.
Comme vous pouvez le voir, une bonne partie de
ces victoires avaient été acquises par des marges très faibles. Avec le NPD
sous les 10% dans les sondages au Québec -donc une baisse de plus de 15 points-
il n’y a aucune chance que ces comtés serrées restent NDP.
L’autre fait marquant est que le PLC avait
terminé 2e dans 13 comtés sur 16. Pour le parti de Trudeau, l’effondrement
du NPD au Québec fournit une banquet de possiblement 13 sièges supplémentaires
(pour rappel le PLC avait remporté 40 sièges en 2015).
Les Conservateurs ne sont pas bien placés pour
aucun de ces sièges. Cela fait en sorte que pour Andrew Scheer, s’il veut avoir
une chance de devenir Premier Ministre, il doit compter sur le Bloc pour
empêcher le PLC de récolter plus de 50 sièges au Québec. Car si un tel scénario
devait arriver, cela rendrait la tâche du chef Conservateur très, très difficile.
Il lui faudrait gagner l’Ontario par une bonne marge. Or, les sondages actuels
ne montrent de loin pas cela.
Est-ce le Bloc peut profiter de la baisse du
NPD pour reprendre du poile de la bête au Québec? Après tout, avant 2011, le
Bloc était quasiment assuré de remporter le plus de sièges dans la province. Pendant
longtemps les électeurs Bloquistes partageaient beaucoup avec le NPD, sauf bien
sûr la question de la souveraineté. Je me souviens que la vague orange de 2011
n’avait pas été une grosse surprise pour moi. Au contraire, je m’attendais à
une percée du NPD à un moment ou un autre.
Tout ça pour dire qu’il n’est pas illogique de
penser que ces électeurs NPD retourneront au Bloc. Le Bloc avait en fait baissé en termes de pourcentages de votes en 2015, cela veut ainsi dire que les votes NPD de 2011 perdus étaient allés au PLC. Est-ce que les électeurs restants sont plutôt du type à avoir le Bloc comme 2e choix? Pas impossible. Un tel transfert d’électeurs
permettrait au Bloc de non seulement gagner une bonne partie de ces 16 comtés,
mais aussi d’aller chercher des sièges au PLC. Utilisons le simulateur pour
illustrer cela.
Si le Bloc pouvait grimper vers les 24-25% tout
en ayant le PLC sous les 35% (donc sous son résultat de 2015), cela ouvre la
porte à de nombreuses victoires dans le 450 et en régions. Tout à coup le Bloc
passe de ses 10 députés en 2015 à 20 et plus. Un tel scénario forcerait presque
assurément une minorité à Ottawa. Je ne vois en effet pas comment le PLC
pourrait retenir sa majorité étant donné les pertes probables en Ontario et
ailleurs.
Le Bloc a aussi une carte majeure à jouer lors
de cette élection : c’est le seul parti qui soutient le Québec dans son
désir d’imposer davantage de laïcité. Si le chef Conservateur a fait savoir
plutôt clairement qu’il ne voudrait pas aller en court pour défaire la loi 21 (bien qu'il ne soutienne pas la loi),
le chef Libéral a été bien moins clair. À une époque où la souveraineté pure ne
semble pas vraiment d’actualité pour le Bloc, se concentrer sur la défense de
la loi 21 pourrait payer. Après tout, une forte majorité de Québécois
soutiennent cette loi.
Nous verrons bien ce que nous réserve la
campagne, mais je ne serais pas surpris de voir le Bloc gentiment remonter vers
les 25% et devenir bien plus compétitif. Après les 4 sièges de 2011, ce serait
toute une renaissance pour le Bloc!
Quant au NPD, il pourra peut-être sauver quelques sièges en concentrant ses efforts. Le chef Singh fait un bon début de campagne et son français est meilleur que prévu. Mais il resterait que ce parti ne conservera vraiseblablement que très peu de ses députés dans la province à moins d'un `norme retournement de situation.